Un personnel professionnel ou bénévole formé à l'écoute, pour une approche spirituelle du deuil, dans le respect des croyances de chacun...
Présentation des aumôniers d’hôpital
Vous pouvez peut-être les
rencontrer dans les couloirs de l’hôpital, lorsque vous y séjournez après la
mort de votre bébé ou si vous venez visiter un malade.
Je vous propose, cette semaine,
de faire le point sur le rôle, la formation, le fonctionnement… des aumôniers
d’hôpital.
J’ai pour cela contacté le
service aumônerie de l’hôpital de Valence, qui a accepté de répondre à mes
questions, ce dont je le remercie vivement !
Nous commenceront par une petite
présentation de cette mission méconnue.
Les aumôniers, des employés de la fonction hospitalière, garants de la liberté de culte à l’hôpital.
Les aumôniers peuvent être des
laïcs ou des religieux.
Ils permettent à ceux qui le
souhaitent un accès facile à leur religion au sein de l’hôpital.
Afin de respecter la laïcité de notre société, toutes les
religions doivent être représentées ou joignables. (Loi du 9 décembre 1905,
Circulaire du 2 mars 2006) On trouve donc des aumôniers catholiques,
protestants, musulmans…, chargés aussi bien de représenter leur culte que
d’assurer un lien avec les autres religions, dans le cas où elles ne seraient
pas représentées directement. C’est donc à l’aumônier musulman, protestant ou
catholique que vous croiserez que vous pouvez demander, si vous le souhaitez,
d’appeler le temple bouddhiste ou le rabbin le plus proche.
Les aumôniers sont nommés par
l’autorité cultuelle de leur culte. Ils sont des employés de l’hôpital ou,
parfois, des bénévoles. Ils sont placés sous l’autorité d’un référent
administratif et respectent les règles s’appliquant aux autres salariés de
l’hôpital.
Accompagner la dimension spirituelle du patient sans jamais faire de prosélytisme.
Le prosélytisme est bien sûr
strictement interdit.
L’aumônier peut avoir été appelé
dans une chambre, même si ça devient moins courant. Il remplit alors son rôle,
et peut aborder les sujets qui intéressent le patient, prier, permettre l’accès
aux sacrements…
L’hôpital peut aussi l’autoriser à passer de chambre en
chambre. La discrétion est alors de mise. Il ne doit pas faire étalage de sa
foi, sauf si on lui pose des questions dessus. Il est là pour écouter la
personne, si elle souhaite lui parler, et quelle que soit sa religion. Il se
fera d’ailleurs le relais des besoins que le malade fait remonter, si ce
dernier souhaite rencontrer quelqu’un de sa religion.
Son rôle est d’écouter, de suivre le patient dans son
cheminement et ses besoins : questionnements, doutes, révoltes, questions
d’ordre spirituel ou existentiel… La maladie et le deuil sont souvent très
déstabilisants pour le patient et son entourage. Il est important qu’ils
puissent être entendus dans toutes les dimensions de leur être, qu’on ne les
limite pas uniquement à un corps à soigner.
Une écoute individuelle, dans le respect de l’intimité du patient, soutenu par une pratique collective.
L’aumônier se présente seul. Les
échanges sont ainsi facilités et la parole plus libre.
Cependant, en dehors de ces
rencontres avec les patients, l’aumônier travaille en équipe.
Pour commencer, les équipes
d’aumônerie des différentes religions s’organisent pour être sûr que tout
l’hôpital est desservi de manière homogène et que deux aumôniers de cultes
différents ne passent pas le même jour dans le même service, par exemple !
L’aumônier travaille en équipe,
de la même religion que lui, avec la quelle il va pouvoir partager les moments
qui l’ont particulièrement touchés ou ceux où il s’est senti en difficulté. Des
réunions hebdomadaires vont être l’occasion d’aborder ces points délicats mais
aussi de discuter des projets à l’étude ou des relations avec les autres
services.
Les aumôniers sont formés
continuellement et accompagnés dans leur mission, en particulier avec de
l’analyse de la pratique, qui peut par exemple être encadrée par une
psychologue de l’hôpital.
L’aumônier, au service de toutes celles et ceux qui passent à l’hôpital
L’aumônier est là pour
tous : les patients, bien sûr, mais aussi les familles, l’entourage du
malade.
La demande peut passer par les
soignants qui transmettent aux cultes demandés.
Les malades, eux, sont les
premiers concernés. L’aumônier les rencontre directement dans leur chambre, en
toute intimité.
Les familles, quant à elles,
peuvent être esseulées, très démunies face à l’épreuve qu’elles traversent, et
avoir grand besoin de parler. Il n’est pas rare qu’elles suivent l’aumônier
hors de la chambre pour pouvoir échanger avec lui et se livrer un peu.
L’aumônier est aussi là pour écouter, aider l’autre à voir plus clair en lui-même et répondre aux demandes de prières, de partage des Textes Sacrés…
Les patients peuvent faire appel
aux aumôniers pour qu’ils puissent recevoir des sacrements (communion…), des
prières « clé » , des invocations ou pour un accompagnement de fin de
vie. Les aumôniers peuvent également aider les patients et leur famille à prier ou à
prononcer des invocations rituelles (naissance, douleur… dans la religion
musulmane).
L’aumônier musulman va également
être appelé pour des questions sur l’adaptation de la pratique religieuse du
malade et de sa famille à l’hôpital. Il joue ainsi un rôle dans le maintien de
la vie spirituelle du patient, malgré les difficultés d’un quotidien bouleversé
par la maladie.
Il arrive aussi souvent que les
aumôniers ne soient pas appelés mais se présentent en passant de chambre en
chambre. Ils rencontrent alors, en proposant leur présence à ceux qui le
souhaitent, un grand besoin d’écoute bienveillante et sans jugement. La quête
de sens revient également très souvent et peut parfois déboucher sur des
questions religieuses.
Si on souhaite pouvoir échanger sur ces questions, faire
le point sur ce que l’on ressent à ce sujet, il ne faut pas hésiter à faire
appel à l’aumônerie, sans attendre que quelqu’un passe dans sa chambre. Les
visites des aumôniers sont en effet souvent très longues, et il arrive
fréquemment qu’ils n’aient pas le temps de passer dans toutes les chambres.
Quel est le travail des aumôniers d'hôpital au quotidien?
Les aumôniers du CH de Valence nous racontent leur quotidien : qui sont-ils, quelles sont leurs missions concrètes au sein de l’hôpital, quelle est leur formation… ?
Quelles sont les religions représentées par les aumôniers de votre hôpital?
Comme la plupart des hôpitaux,
nous avons en notre sein des représentants des religions catholiques,
protestantes et musulmanes.
Un ou deux hôpitaux accueillent
aussi des aumôniers de confession bouddhiste. Ca reste rare cependant.
Comme il est important que chacun puisse pratiquer sa
religion selon ses besoins, dans un objectif de laïcité, les aumôniers présents
dans l’hôpital sont chargés de contacter les autres responsables religieux, à
la demande des patients.
Nous avons toujours à disposition
un carnet d’adresse nous permettant de contacter la synagogue ou le temple
bouddhiste le plus proche !
Quel est le rôle des aumôniers à l’hôpital ? Quelles sont vos missions ?
Au départ, il s’agissait avant
tout de répondre aux demandes d’ordre cultuel. A l’hôpital, les gens ne peuvent
pas sortir, ils sont fatigués, un peu hors du temps. Nos services ont été mis
en place pour leur permettre d’accéder à leur culte sans se déplacer.
Néanmoins, aujourd’hui, les choses ont changé. La
pratique n’est plus aussi importante qu’autrefois, et nous sommes moins appelés
dans ce cadre-là.
Ce qui reste, en revanche, c’est
le besoin de spirituel, la quête de sens, qu’elle ait une réponse religieuse ou
pas.
Nous sommes là pour ça. Pour
écouter l’autre, son cheminement, pour qu’il puisse dire sa dimension
spirituelle s’il en ressent le besoin. Pour visiter le patient, aussi, créer
une relation humaine, nourrissante. Certaines personnes, très seules, sont en
effet besoin, tout simplement, de pouvoir parler à quelqu’un.
La plupart du temps, c’est la
question du sens qui va ressortir : quel sens peut avoir l’épreuve que je
vis ? Y en a-t-il un, d’ailleurs ?
Parfois, certaines personnes vont
relier ces questions à Dieu, à la pratique de leur religion, mais pas toujours.
Nous ne sommes pas là pour
« porter la bonne parole », mais pour écouter, recueillir les larmes.
C’est le maître mot de notre pratique. Nous nous adaptons à la personne, à ce
qu’elle est à un moment donné et, par notre oreille attentive et bienveillante,
nous l’aidons à y voir plus clair en elle, à mieux percevoir là où elle en est.
Il ne s’agit donc pas d’une approche directive au cours de laquelle vous délivreriez un enseignement, le point de vue de votre religion, par exemple ?
Non, nous sommes simplement là,
signes que le religieux est là pour ceux qui le souhaitent, que les
institutions religieuses sont présentes dans la vie de ceux qui en éprouvent le
besoin, quelles que soient les épreuves qu’ils traversent.
Notre manière d’être doit être un
témoignage de cette présence, de cette attention portée à l’autre.
Notre foi nous soutient, la lecture des textes sacrés
(Bible, Coran…) aussi, mais nous n’en parlons pas, à moins que cela n’intéresse
le patient et qu’il nous le demande expressément.
Il n’est pas question de faire du
prosélytisme ! Et d’autant plus lorsque celui qui nous reçoit dans sa
chambre peut être affaibli.
Nous nous contentons de présenter
l’Aumônerie, de dire que nous existons, et nous ne restons avec la personne que
si elle le souhaite, en restant au plus près de la tonalité qu’elle va donner à
la conversation.
Il s’agit de respecter, toujours,
sans jamais imposer, et d’être en permanence ouvert à la rencontre.
Finalement, on peut distinguer 3
volets dans notre pratique personnelle :
- La présentation de notre service, de l’aumônerie que nous représentons, avec les services qu’elle propose (cérémonies religieuses, sacrements, conseils sur la pratique…)
- L’accompagnement de la personne, qui est une adaptation à la personne, à ce qu’elle veut dire / livrer, en fonction de son histoire, du moment où l’aumônier arrive, de sa culture…
- La réponse, lorsque le patient le demande, à un
besoin de pratique cultuelle.
Pour que ce travail puisse se faire dans le respect de l’autre, il faut beaucoup de recul sur soi, ses croyances, son cheminement… Recevez-vous une formation pour vous aider ?
Oh que oui ! C’est indispensable, et obligatoire quelle
que soit notre religion.
Au départ, nous sommes formés par
les autorités de notre religion, au maximum à l’aide de formations diplômantes.
Concrètement, comment cela se passe-t-il pour les catholiques ?
L'équipe de l’aumônerie catholique du CH de Valence |
Et pour les musulmans ?
La Grande Mosquée de Paris propose un diplôme d’aumônier,
qu’il est possible d’obtenir en 2 ans. Nous recevons nous aussi des cours sur
l’accompagnement des malades et l’écoute. Nous abordons également de nombreuses
questions religieuses. Nous avons des cours sur le Coran, par exemple, sur le
rôle et les devoirs du musulman dans la société… Il est en effet important que
nous sachions répondre concrètement et précisément aux questions que l’on nous
pose sur la pratique de la religion. On nous consulte beaucoup à ce sujet
(comment faire ses prières lorsqu’on est cloué sur son lit et qu’on ne peut
plus faire ses ablutions comme d’habitude ? Quelles sont les règles
prévues par le Coran pour prendre en compte la fatigue des familles et des
malades tout en maintenant une vie spirituelle active ?…).
Nous devons orienter vers une pratique respectueuse du
patient, de ce qu’il vit, capable de le soutenir et non de le décourager. C’est
pourquoi les aumôniers sont choisis pour leur pratique équilibrée de la
religion.
Au terme des 2 années, nous sommes reçus par l’aumônier
national, qui s’entretient avec nous et délivre l’agrément qui nous permettra
d’exercer dans les hôpitaux.
Et chez les protestants, quelle est la formation reçue ?
L’aumônerie protestante est
constituée souvent de pasteurs et de bénévoles.
Les pasteurs, de fait, ont suivi
une solide formation théologique de 5 ans.
Les bénévoles, quant à eux,
suivent une formation à l’écoute puis 6 jours de formation par une association
agréée de formation à la supervision pastorale.
Le visiteur bénévole travaillera
ensuite avec un autre visiteur, plus expérimenté, pour ses premières rencontres
avec les patients. Petit à petit, il deviendra autonome mais continuera d’être
suivi régulièrement.
Par ailleurs, pour l'ensemble des aumôniers, des analyses de la
pratique, réalisées avec une psychologue indépendante, ont lieu tous les 2
mois.
Par la suite, tous les aumôniers
salariés par l’hôpital peuvent se former, en formation continue auprès
de :
- L’hôpital, puisque nous pouvons bénéficier des mêmes formations que le reste du personnel hospitalier. Nous avons par exemple reçu des cours destinés aux aidants des malades atteints de la maladie d’Alzheimer mais aussi des leçons de lavage de main, très importantes lorsqu’on travaille dans un milieu médical.
- Les autres services. C’est surtout vrai si nous ressentons que nous avons besoin de nous former sur une pathologie particulière, afin de mieux s’adapter aux patients. Nous pouvons alors demander au personnel d’un service particulier de nous aider en concoctant une journée de formation. C’est toujours très intéressant, et cela nous permet aussi de créer des liens avec les autres services, ce qui est important puisque nous sommes collègues. Nous avons ainsi pu avoir l’intervention d’un orthophoniste ou d’un psychologue gériatre qui nous ont beaucoup aidées.
- Les autorités religieuses peuvent aussi proposer des parcours de formation continue. La pastorale de la Santé, par exemple, organise des sessions sur la laïcité, l’écoute, l’islam, la vision chrétienne de la personne, l’éthique… Certains de ces cours peuvent être suivis par ceux qui le souhaitent, quelle que soit leur religion, du moment qu’ils interviennent dans le domaine de l’aide à la personne.
- Diverses associations (associations de soutien aux malades et à leur famille…)
Aumôniers à l'hôpital : dans le cas d'un deuil périnatal
Nous allons voir comment les aumôniers d’hôpital peuvent aider les parents subissant un deuil périnatal.
Les aumôniers font-ils des visites dans les maternités ?
Cela varie selon les hôpitaux.
Dans notre Centre Hospitalier, à Valence,
ce n’est pas le cas systématiquement, ils viennent au besoin.
C’est une question à travailler
avec le personnel soignant, afin que la présence des aumôniers soit une réelle
source de réconfort.
Le risque, si le rôle des
aumôniers n’est pas clairement expliqué, est que leur présence soit source de
stress dans des services où vie et mort se côtoient, comme en néonatologie, par
exemple. En effet, des parents mal préparés pourraient penser, en voyant
arriver l’aumônier, que le pronostic vital de leur bébé est engagé alors qu’il
s’agit simplement de parler et d’échanger sur ce qu’ils vivent ! Il s’agit
de respecter avant tout le bien être du patient…
Les aumôniers peuvent bien sûr
venir sur une simple demande des parents auprès des personnels de santé.
Dans le cas d’un deuil périnatal, que peuvent apporter les aumôniers d’hôpital ?
Pour les catholiques, le baptême
est un sacrement important, par lequel les parents disent leur souhait que leur
enfant appartienne à la communauté chrétienne et soit reconnu comme
« enfant de Dieu ».
Habituellement, ce sacrement est
précédé d’une préparation spirituelle et a lieu dans les mois qui suivent la
naissance du bébé.
Lorsqu’un deuil périnatal
intervient, les religions chrétiennes reconnaissent l’importance et le
caractère sacré de la vie du bébé, aussi courte soit-elle, et les parents
peuvent également décider de donner à leur enfant le sacrement du baptême.
Si les parents savent que leur
enfant, déjà né, est en fin de vie, ils peuvent ainsi demander son baptême, en
urgence. Ils appelleront pour cela l’aumônerie.
Si le bébé est mort in-utero, les
parents pourront parler avec un aumônier ou un prêtre de l’importance de ce
sacrement pour eux, et du projet qu’ils avaient de faire baptiser leur enfant.
Cette intention sera reconnue comme « baptême de désir », sans qu’il
y ait besoin de faire une cérémonie. La place et l’importance de leur enfant
dans leur famille et dans la communauté chrétienne est ainsi marquée.
Pour les parents protestants, le
baptême est le signe de la grâce de Dieu et de la place marquée dans l’Église.
Il est donc important, mais Dieu précédant les signes humains, un enfant qui
viendrait à mourir sans avoir été baptisé est, de fait, déjà auprès de Dieu.
Les protestants ne proposent donc
pas de baptême d’intention, ni d’ailleurs d’autres rituels.
En revanche, l’aumônier pourra
dialoguer avec les parents, répondre à leurs questions et les accompagner sur
les premiers moments du douloureux chemin de deuil.
On trouve dans la religion musulmane le même soin apporté à
reconnaître
l’enfant, l’amour que sa famille lui porte et sa dignité au sein de la société.
l’enfant, l’amour que sa famille lui porte et sa dignité au sein de la société.
C’est pourquoi les parents pourront, s’ils le souhaitent,
appeler l’aumônier afin qu’il procède à la toilette mortuaire de leur bébé, dès
lors que celui-ci aura atteint 4 mois de gestation.
Il sera alors habillé avec soin d’un linceul blanc.
L'aumônière musulmane et moi-même :) |
La prière des morts, elle,
ne sera jamais prononcée, du fait de l’innocence du bébé.
Dans tous les cas, les échanges avec un aumônier, formé à
l’écoute et à la relation d’aide, permettront d’entamer un chemin long et
douloureux vers la prise de conscience de ce qui se produit dans la famille.
C’est par la parole que, petit à petit, les parents pourront réaliser que
l’inconcevable est arrivé et donner à leur tout-petit une juste place dans leur
famille.
Encore merci à l'aumônerie pour son accueil!
Encore merci à l'aumônerie pour son accueil!
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