vendredi 31 octobre 2014

Une Journée Particulière, d'Anne-Dauphine Julliand

Un livre sur la force de la vie et de l'amour face à la mort.

Une Journée Particulière est un très beau livre sur le deuil qui ne dit pas son nom.

Un livre sur la force de l'amour, dace à la mort, après Deux Petits Pas sur le Sable Mouillé.
Anne-Dauphine Julliand y raconte la journée qu'elle consacre aux 8 ans de sa fille, Thaïs, morte 4 ans auparavant des suites d'une maladie orpheline.
On la suit dans les moments qu'elle vit avec son entourage : ses 2 garçons et son autre petite fille, qui se bat elle aussi contre la même maladie, son mari, ses amis...
Elle y raconte, du lever au coucher, les rencontres, les va-et-vient de l'âme, les moments de recueillement et de tête à tête avec soi-même, la cohésion familiale mais aussi, la solidarité, l'amour, l'amitié, la joie et la douleur qui l'habitent.
A travers cette journée, l'auteur nous fait vivre, toucher du doigt, sa vie, cette vie pleine de l'absence de Thaïs mais aussi et surtout pleine de l'existence de cette petite fille, de l'amour et de la beauté de la relation qu'ont eue ceux qui l'aimaient avec elle.



On ne choisit pas ce qui nous arrive dans la vie.
Comme l'auteur, l'idée que le malheur se mériterait, par trop de grandeur d'âme ou pas assez, m'est insupportable.

Non, on ne choisit pas ce qui nous arrive, mais on choisit ce que l'on en fait. 

C'est l'histoire de ce choix, de cette liberté que raconte, en filigrane, Une Journée Particulière .
Anne-Dauphine et sa famille ont fait le choix de l'amour, de la vie. Ils ont suivi leur toute petite et si courageuse fille sur le chemin qu'elle leur indiquait. C'est devenu leur chemin de deuil après sa disparition.

Le deuil passe par des phases de choc, de déni, de colère, de désorganisation, puis de réorganisation.

C'est cette reconstruction qui nous est contée. 

Cette transformation d'une jeune femme ordinaire, une belle personne qui s'ignore, au bonheur insolent, en une autre femme. Plus fragile et plus forte à la fois.
Fragile de la douleur qu'elle porte en elle, à jamais. Car un deuil ne se finit jamais, car l'amour reste vivant lorsque celui ou celle que l'on aime meurt.
Mais forte, aussi.
Forte d'être ancrée en elle-même, de s'appliquer à ne dépendre que d'aujourd'hui, d'avoir éprouvé que son bonheur ne dépend pas de ce qui lui arrive dans la vie, mais de ce qu'elle est profondément.
Forte, aussi, des rencontres et de l'humanité dont sa fragilité lui a ouvert les portes.
Forte d'être restée vivante, pour elle mais aussi pour sa fille, et de ne pas s'être définie par cette partie de son histoire, de ne pas s'être emmurée dans sa douleur.

On parle souvent de la grâce et du sourire de populations lointaines, bien moins fortunées que nous, bien plus exposées à la guerre et aux maladies.
Leur joie de vivre semble être un mystère, une leçon que nous, occidentaux, comprenons mal... D'où viennent ces sourires à la vie, lorsque tout autour de soi semble si incertain? Pourquoi nous, qui avons tout, restons-nous malgré tout si insatisfaits ?
Après la mort de ma fille, le secret de ces sourires m'est devenu familier et c'est lui que j'ai retrouvé en lisant les 2 livres d'Anne-Dauphine Julliand, Deux petits pas sur le sable mouillé et Une Journée Particulière.

Elle nous raconte cette même joie, enracinée dans l'ici et maintenant, dans l'expérience que seul aujourd'hui est sûr, que demain, tout peut basculer. 

Un bonheur plus intense, car il est urgent de profiter de chaque instant, de chaque échange, de chaque joie qui nous est donnée, que personne ne pourra nous reprendre.
Un bonheur dont la saveur est décuplé par l'expérience de la douleur.
Mais un bonheur moins serein aussi, d'après mon expérience, comme s'il avait, d'une certaine manière, perdu son innocence en reconnaissant la vulnérabilité de la vie.

C'est ce bonheur que l'auteur dit, entre force et fragilité. 

De cette expérience de l'amour et de la souffrance, elle a fait un moteur. Un moteur pour oser rencontrer l'autre, là où il est dans sa vie, dans les moments de grâce comme de désespoir.


Il y a dans ce livre cette très belle phrase :
"Le réconfort n'est pas affaire de bienséance. C'est une histoire d'amour. La consolation consiste à sortir de soi, non pour se mettre à la place de celui qui souffre, ça n'est pas possible, mais pour aller au point de rencontre, là où le lien se tisse, où le cœur s'ouvre et la plaie se referme".

C'est le cadeau de Thaïs à ses parents, me semble-t-il. 

Par sa vie, cette vie qu'ils ont su rendre belle, riche d'amour reçu et donné, ils se sont mis en route, vers eux-même et vers les autres.
C'est un très beau cadeau, que l'auteur nous partage avec tendresse et simplicité.
Merci à elle
.


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