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lundi 23 mars 2015

Pères et IMG


La douleur des pères confrontés à l'Interruption Médicale de Grossesse.

J'ai regardé ce matin le replay des Maternelles de vendredi dernier, qui donnait la paroles à des pères ayant vécu une IMG.




La douleur des pères lors d'un deuil périnatal
Je suis encore émue de ces témoignages simples, poignants, vrais.
La parole des hommes entendus, l'humanité du spécialiste invité à s'exprimer ouvrent un espace, la possibilité de comprendre, d'entendre, enfin, une douleur tue, bien souvent par souci "d'être fort" de ne pas "alourdir la peine de la mort".
Cela se murmure de plus en plus : la force des hommes, leur pudeur, leur silence, ne sont pas de l'insensibilité. Une étude est même parue, en 2011, qui montre que ces hommes si "forts", dont les compagnes pensent qu'ils ont moins de peine, sont souvent sujet à des dépressions deux ans après la mort de leur bébé. Ils ont du mal à accueillir l'enfant d'après, bien vivant, se montrent nerveux, irritables...

Alors oui, l'émission de vendredi est une bonne nouvelle
Elle permet de rompre le silence, les malentendus aussi qui brisent les couples...

Elle rappelle, en premier lieu, qu'un enfant qui meurt, c'est, pour l'homme comme pour la femme, une amputation du projet parental et conjugal.

Oui, un bébé, ça se fait à deux, oui, Monsieur aussi s'était projeté dans la grossesse.
C'est vrai, il ne sentira pas le bébé de l'intérieur, c'est vrai, la réalité de cet enfant qui grandit dans le ventre de sa femme ne s'imposera pas à lui de la même manière. Mais il touchera le ventre de sa femme, se penchera dessus pour lui parler, tentera de ressentir les petits coups de pied.
Tout comme sa femme, bien souvent, il a un vécu sensible avec son enfant.
Il est de la responsabilité des soignants de reconnaître sa paternité, de lui laisser sa place, de parler de l'enfant du couple, et non de la seule mère.
Se sentir ainsi reconnu soulage la douleur, et aide aussi à l'exprimer.

Il était également très intéressant d'entendre combien, pour soulager leur femme, certains hommes peuvent mettre de côté leur propre douleur... 


Se cacher pour pleurer, éviter de parler trop du bébé, parler de choses plutôt positives.

Quelle émotion d'entendre cette parole ainsi libérée, mais aussi quel chemin il reste à faire, pour que les hommes ne se sentent plus obligés, à cause de leur éducation, de faire semblant...
Quel chemin avant qu'homme et femme se rencontrent en vérité, et comme l'équilibre est fragile...
Quel chemin aussi pour que le deuil en général, et le deuil périnatal en particulier soient mieux connus. J'aimerais tant que notre société retrouve un chemin vers des rites, s'autorise à vivre et partager la peine en public,  sans que l'autre craigne immédiatement une dépression, sans pression démesurée pour "aller bien"...

Ces pères, par leur parole, permettent en pas dans cette direction.

Les groupes de parole, évoqués dans le reportage, vont aussi dans ce sens. 

Qu'il puisse en exister dédiés aux pères m'a interrogée, je n'y avais jamais pensé, car les groupes que je connais sont mixtes.
Peut-être des groupes mixtes permettent-ils au couple de mieux se comprendre, mais peut-être aussi des groupes dédiés aux pères libèrent-ils mieux la parole?
Cela ne peut, en tout cas, qu'être une bonne idée que de faire cette proposition, afin que chacun trouve la formule qui lui convient le mieux.

Les échanges insistaient aussi beaucoup sur la nécessité de laisser du temps entre le diagnostic, la décision et la naissance.

Parce que le temps est nécessaire au deuil, à la réalisation par l'esprit des parents de cet impensable qui arrive, à l'élaboration, justement, de rituels qui aideront le couple à faire face à la naissance et à la mort de leur bébé.
L'un des papas a ainsi raconté qu'ils avaient, avec sa femme, fait une liste des choses à vivre avec leur enfant, avant sa mort, à 3, mais aussi avec leur famille, leurs amis.
Quelle émotion, quelle beauté aussi dans ce temps passé ensemble, qui a permis à leur bébé de trouver sa place dans leur famille, aux souvenirs lumineux de se tisser, à leur bébé d'exister, non comme un drame, mais d'abord comme le fruit d'une belle histoire d'amour...

Pour finir, le spécialiste a redit combien ce deuil, très particulier, était difficile à vivre; combien, plus que d'autres, il pouvait générer des dépressions, même chez des personnes en bonne santé, à l'aise dans leur vie.
Combien, donc, connaissant ce risque, il ne faut pas hésiter à demander de l'aide

Enfin, l'émission se terminait sur l'évocation des "grossesses d’après".

J'ai trouvé très bien que le psy présent reconnaisse l'élan vital de ces grossesses, un élan qui n'est pas forcément pathologique.
C'est vrai que l'inquiétude des professionnels peut être culpabilisante. Il n'en reste pas moins que, plus les grossesses seront rapprochées, plus l'angoisse de la mère (et peut-être du père?) sera grande, la différence entre les deux grossesses étant plus difficile à faire. Les parents ont alors sans cesse peur de revivre la même chose.
Tout en reconnaissant combien cet élan est justifié, combien il a le droit d'exister, il me semble donc nécessaire d'accompagner tout particulièrement ces grossesses d'après, afin de pouvoir entendre les angoisses qui se feront jour et y répondre, et de pouvoir également, éventuellement, déceler un problème si le lien entre l'enfant et ses parents se tisse mal.

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